Le gouvernement a deux semaines pour trouver dix milliards d’euros.
Le gouvernement, qui a désormais les mains libres au lendemain des législatives, dispose de deux semaines pour trouver une dizaine de milliards d’euros et résoudre sa première équation budgétaire, sur fond de climat économique dégradé.
Tant que les électeurs ne s’étaient pas exprimés, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault et son équipe avaient veillé à rester discrets sur les arbitrages en cours. Mais le calendrier va désormais s’accélérer.
La Cour des comptes a fait savoir lundi que la publication de son audit des finances publiques, initialement prévue le 28 juin, était reportée « de quelques jours ». En cause, un problème d’agenda gouvernemental.
Sommet crucial le 28 juin
En fait, le 28 juin s’ouvre à Bruxelles un sommet crucial de l’Union européenne, au cours duquel le président François Hollande compte plaider pour une politique de croissance qui fasse contrepoids à l’austérité.
Or, le rapport des magistrats financiers devrait rappeler au gouvernement la nécessité, pour tenir ses engagements de réduction du déficit public, de maîtriser, voire réduire la dépense.
La publication du rapport a donc été repoussée pour ne pas embarrasser le chef de l’Etat, a-t-on laissé entendre de source proche du dossier. L’exécutif dit, en effet, vouloir s’appuyer sur cet audit pour connaître l’état réel des comptes et prendre, en conséquence, ses premières décisions.
L’audit devrait être dévoilé le 2 ou, au plus tard, le 3 juillet. Juste avant que Bercy ne finalise son projet de loi de finances rectificative pour 2012, attendu le 4 juillet en conseil des ministres.
En réalité, l’exécutif connaît déjà les données du problème: le ministre de l’Economie Pierre Moscovici a expliqué que, si rien n’était fait, le déficit public s’établirait en fin d’année à 5% du produit intérieur brut (PIB). C’est à peine mieux que les 5,2% de 2011, et c’est loin des 4,5% promis.
Il faut donc trouver une dizaine de milliards pour corriger ce dérapage, s’il est confirmé par la Cour des comptes, relève-t-on de source gouvernementale. Voire davantage si la France entre en récession, comme le redoutent certains économistes, et si la croissance de 0,5% escomptée pour cette année n’est pas au rendez-vous.
La marge plus étroite pour 2013
L’étape 2012 n’est toutefois pas la plus complexe à franchir. Bercy a déjà annoncé son intention de jouer d’abord sur les recettes. Comme prévu dans le projet de François Hollande, plusieurs prélèvements seront relevés (impôt sur la fortune, droits de succession, forfait social sur l’intéressement et la participation) ou créés (contribution exceptionnelle sur les bénéfices des banques et des compagnies pétrolières).
Le collectif budgétaire sonnera aussi le glas de la TVA sociale et de la défiscalisation des heures supplémentaires (l’exonération de cotisations patronales sera maintenue pour les entreprises de moins de vingt salariés).
Une surtaxe pour les nuitées en hôtel de luxe est aussi à l’étude, mais la majorité s’interroge sur son opportunité à l’orée de la saison touristique.
« Les engagements pris par la France en matière de finances publiques seront tenus et cela se fera sans politique d’austérité », a réaffirmé Pierre Moscovici dimanche soir, après les législatives.
En écho, le secrétaire général de Force ouvrière Jean-Claude Mailly a prévenu qu’il n’accepterait pas « une logique d’austérité« , au moment où le chômage ne cesse d’augmenter et où des plans sociaux mis en sourdine pendant la campagne électorale défrayent la chronique.
La marge de manoeuvre sera plus étroite pour 2013, d’autant que Bercy pourrait réviser à la baisse sa prévision de croissance de 1,7%, jugée intenable. Le gouvernement devra ramener le déficit public à 3% du PIB et s’est engagé à « maîtriser » les dépenses, sans vraiment dire comment.
Les premières réponses seront connues avec le débat d’orientation budgétaire au Parlement, début juillet, puis à la rentrée de septembre avec le budget pour l’an prochain, qui parachèvera également la réforme fiscale.
B. Grandon